Le suivi des salariés en forfait jours

Sommaire

Rappels

Le dispositif du forfait en jours (nécessairement sur l’année) permet de rémunérer certains salariés sur la base d’un nombre de jours travaillés annuellement, sans décompte du temps de travail.

Seuls peuvent conclure une convention individuelle de forfait en jours sur l’année, dans la limite du nombre de jours fixé par l’accord collectif :

  • les cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auquel ils sont intégrés ;

 

  • les salariés (non cadres) dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui leur sont confiées.
Rupture contrat

Des remises en cause fréquentes

La Cour de cassation est régulièrement saisie de contestations relatives à la validité de conventions individuelles de forfait en jours, portant notamment sur la violation de l’obligation de s’assurer de la protection de la sécurité et de la santé des salariés par le biais du suivi de la charge de travail.

Cette violation peut résulter, soit de l’absence de clauses sur le sujet dans l’accord collectif et de l’absence de mesures supplétives (arrêt du 10 janvier 2024, pourvoi n° 22-15.782), soit du non-respect par l’employeur des clauses prévues par l’accord collectif, notamment des dispositions prévoyant la communication périodique entre l’employeur et le salarié sur sa charge de travail, l’articulation de sa vie professionnelle et personnelle, sa rémunération ou encore l’organisation du travail dans l’entreprise (C. trav., art. L. 3121-64 II).

L’arrêt du 10 janvier 2024 (pourvoi n° 22-13.200) est une illustration du deuxième cas de figure.

Le suivi de la charge de travail

Dans cette affaire, il était reproché à l’employeur de ne pas avoir respecté les modalités conventionnelles sur le suivi de la charge de travail en raison du report à l’année suivante d’un des entretiens annuels obligatoires, de la surcharge de travail et du non-respect des temps de repos.

En l’espèce, l’employeur avait reporté l’entretien annuel « forfait jours » de 2018 en mars 2019 en raison de la démission de son directeur général.

La Cour de cassation apporte des éléments de réponse.

L’existence de contraintes internes justifiant un report de l’entretien à l’année suivante est inopérante dès lors qu’il est constaté que, lors du dernier entretien, le salarié avait donné des alertes (il avait signalé l’impact sérieux de sa charge de travail et le non-respect ponctuel du repos hebdomadaire), que le repos hebdomadaire n’avait pas été respecté à plusieurs reprises et que les convocations pour l’entretien pour 2018 n’avaient été adressées qu’en mars 2019.

La surcharge de travail et le non-respect des temps de repos

Le salarié contestait également la régularité de la convention de forfait, reprochant à l’employeur de ne pas avoir rendu effectives les garanties mises en place par l’accord collectif sur le forfait jours en ne recherchant pas de solutions sur sa surcharge de travail et en ne vérifiant pas le respect des règles relatives au temps de repos quotidien et hebdomadaire.

La Cour de cassation a fait droit au salarié, en s’appuyant sur l’obligation de sécurité prévue à l’article L. 4121-1 du code du travail, dès lors qu’il a été constaté que le repos hebdomadaire n’a pas été respecté à plusieurs reprises et que le forfait annuel a été dépassé (en 2016, 2017 et 2018).

Il en résulte que l’employeur s’est abstenu de mettre en place des mesures de nature à remédier en temps utile à une charge de travail incompatible avec une durée raisonnable de travail, dont il avait été informé.

Ce qu'il faut retenir !

    • Le Code du travail exige que toute convention de forfait en jours soit prévue par un accord collectif d’entreprise ou de branche comportant des stipulations relatives au suivi de la charge de travail précisées à l’article L 3121-64, II du Code du travail (C. trav. art. L 3121-63).

 

    • L’employeur s’assure de la compatibilité de la charge de travail du salarié avec le respect des temps de repos quotidien et hebdomadaire ;

 

    • L’employeur assure l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;

 

    • L’employeur et le salarié communiquent périodiquement (notamment à l’occasion d’un entretien au minimum annuel) sur la charge de travail du salarié, l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sa rémunération, ainsi que sur l’organisation du travail dans l’entreprise ;

 

    • L’employeur doit s’assurer que le salarié peut exercer son droit à la déconnexion et en prévoir les modalités.

 

Sources : 

  • Cass. Soc., 10 janv. 2024, n°22-13.200

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